ast
2013-03-15 12:21:32 UTC
Guy Môquet est le fils d'un cheminot qui doit son ascension sociale au
Parti Communiste auquel il voue un culte. Quand les communistes russes
et les nazis signent le pacte germano-soviétique, le PCF obéit à la décision
de Staline. Dès lors, le Parti se réjouit de la défaite de juin 40 : selon eux,
elle signe l'échec de la démocratie parlementaire, du capitalisme juif, de la
bourgeoisie d'affaire. De plus, elle prépare la France à la révolution
bolchevique ardemment souhaitée. L'Allemagne peut donc envahir la
Pologne, puis la France, l'URSS ne bouge pas, les communistes français
approuvent. L'Angleterre décrète un blocus économique contre l'Allemagne
nazie, mais l'Union Soviétique laisse transiter sur son territoire les produits
qui ravitaillent les nationaux-socialistes. Le PCF ne dit rien. Le 29 septembre
1939, nazis et communistes demandent la fin de la guerre afin que Staline
garde les territoires conquis et Hitler les siens. Les députés communistes
envoient une lettre en ce sens à Edouard Herriot, le Président de la Chambre.
En cas de refus, la France et l'Angleterre porteront la responsabilité de la guerre
qui deviendrait impérialiste ! La France refuse. Le PCF invite alors ses militants
au sabotage. Ils ne s'en privent pas et causent la mort de soldats français
envoyés au combat avec du matériel qui les lâche en plein milieu de la bataille.
Le père de Guy Môquet soutient cette ligne, il est arrêté et emprisonné. Le fils
clame haut et fort qu'il reprend le flambeau et continue le combat du père qui,
on le voit, n'est pas un combat de résistance, mais de collaboration avec les
nazis liés aux staliniens par le pacte. Des tracts sont distribués, voici ce à quoi
invite l'un d'entre eux le 27 juillet 1940 :
« Les soldats allemands sont vos frères, pactisez, ne vous trompez pas, votre
ennemi c'est le grand capital, les trusts de France, d'Angleterre, d'Amérique »
. Les tracts distribués par Guy Môquet n'appellent pas à la résistance : ils
épargnent les nazis, accablent les capitalistes français, justifient le pacte germano
-soviétique, attaquent l'Angleterre et les Anglais, insultent de Gaulle, font de
l'URSS le pays de la liberté et de la démocratie. Guy Môquet est arrêté par la
police de Vichy le 13 octobre 1940, non pas comme résistant, mais comme
communiste stalinien appelant à pactiser avec l'occupant nazi. Il est interrogé,
mais pas torturé. Il vit dans le camp sous un régime qui n'est pas concentrationnaire.
Le 22 juin 1941, Hitler envahit l'URSS. Fin du pacte germano-soviétique brisé
unilatéralement par les nazis. Les communistes changent de stratégie, presque
un an après la déclaration de la guerre, ils entrent enfin dans la résistance. Des
nazis sont abattus dans les rues. L'occupant organise des représailles et prélève
des otages dans les prisons. C'est dans cette configuration que Guy Môquet est
fusillé le 22 octobre 1941. Le PCF qui a demandé la reparution de L'Humanité
le 20 juin 1940 à l'occupant nazi sous prétexte qu'ils avaient des ennemis communs,
(les juifs, les capitalistes, les anglais, la ploutocratie, le parlementarisme, lire le
détail dans Juin 40. La négociation secrète de Jean-Pierre Besse et Claude Pennetier),
ont eu besoin de se refaire une santé à la Libération - avec l'assentiment du général
de Gaulle. Guy Môquet fut un moment idéal dans le dispositif légendaire communiste :
ce jeune homme stalinien qui défendait l'union des communistes avec les nazis contre
la démocratie parlementaire, autrement dit le contraire de la Résistance, devint la
figure emblématique d'une résistance communiste totalement inexistante à cette
époque.
Il y eut d'autres moments dans cette légende : le PCF fabriqua un faux pour faire
croire qu'il avait appelé à la Résistance dès le 10 juillet 1940, « l'appel du 10 juillet » ;
il s'intitula « le parti des 75.000 fusillés », alors qu'il y eut au total 4100 fusillés et
que tous n'étaient pas communistes ; il présenta fautivement quelques noms de
communistes comme résistants de la première heure (Tillion, Guingouin, Havez) alors
qu'ils furent de bons soldats du pacte hitléro-stalinien ; etc. « Qu'avez-vous encore
contre les communistes ? » me feront savoir nombre de mails ou de courriers que
je sais déjà insultants. « Rien ». Rien contre les communistes, mais tout pour
l'Histoire. Qu'il s'agisse de Freud et des freudiens, de Sartre et des sartriens, des
communistes et de leur saga, le combat contre la légende et les mythes s'effectue
moins « contre » que « pour » - en l'occurrence : pour l'histoire. Car le déni de
l'histoire constitue et nourrit le nihilisme.
Michel Onfray
2011
Parti Communiste auquel il voue un culte. Quand les communistes russes
et les nazis signent le pacte germano-soviétique, le PCF obéit à la décision
de Staline. Dès lors, le Parti se réjouit de la défaite de juin 40 : selon eux,
elle signe l'échec de la démocratie parlementaire, du capitalisme juif, de la
bourgeoisie d'affaire. De plus, elle prépare la France à la révolution
bolchevique ardemment souhaitée. L'Allemagne peut donc envahir la
Pologne, puis la France, l'URSS ne bouge pas, les communistes français
approuvent. L'Angleterre décrète un blocus économique contre l'Allemagne
nazie, mais l'Union Soviétique laisse transiter sur son territoire les produits
qui ravitaillent les nationaux-socialistes. Le PCF ne dit rien. Le 29 septembre
1939, nazis et communistes demandent la fin de la guerre afin que Staline
garde les territoires conquis et Hitler les siens. Les députés communistes
envoient une lettre en ce sens à Edouard Herriot, le Président de la Chambre.
En cas de refus, la France et l'Angleterre porteront la responsabilité de la guerre
qui deviendrait impérialiste ! La France refuse. Le PCF invite alors ses militants
au sabotage. Ils ne s'en privent pas et causent la mort de soldats français
envoyés au combat avec du matériel qui les lâche en plein milieu de la bataille.
Le père de Guy Môquet soutient cette ligne, il est arrêté et emprisonné. Le fils
clame haut et fort qu'il reprend le flambeau et continue le combat du père qui,
on le voit, n'est pas un combat de résistance, mais de collaboration avec les
nazis liés aux staliniens par le pacte. Des tracts sont distribués, voici ce à quoi
invite l'un d'entre eux le 27 juillet 1940 :
« Les soldats allemands sont vos frères, pactisez, ne vous trompez pas, votre
ennemi c'est le grand capital, les trusts de France, d'Angleterre, d'Amérique »
. Les tracts distribués par Guy Môquet n'appellent pas à la résistance : ils
épargnent les nazis, accablent les capitalistes français, justifient le pacte germano
-soviétique, attaquent l'Angleterre et les Anglais, insultent de Gaulle, font de
l'URSS le pays de la liberté et de la démocratie. Guy Môquet est arrêté par la
police de Vichy le 13 octobre 1940, non pas comme résistant, mais comme
communiste stalinien appelant à pactiser avec l'occupant nazi. Il est interrogé,
mais pas torturé. Il vit dans le camp sous un régime qui n'est pas concentrationnaire.
Le 22 juin 1941, Hitler envahit l'URSS. Fin du pacte germano-soviétique brisé
unilatéralement par les nazis. Les communistes changent de stratégie, presque
un an après la déclaration de la guerre, ils entrent enfin dans la résistance. Des
nazis sont abattus dans les rues. L'occupant organise des représailles et prélève
des otages dans les prisons. C'est dans cette configuration que Guy Môquet est
fusillé le 22 octobre 1941. Le PCF qui a demandé la reparution de L'Humanité
le 20 juin 1940 à l'occupant nazi sous prétexte qu'ils avaient des ennemis communs,
(les juifs, les capitalistes, les anglais, la ploutocratie, le parlementarisme, lire le
détail dans Juin 40. La négociation secrète de Jean-Pierre Besse et Claude Pennetier),
ont eu besoin de se refaire une santé à la Libération - avec l'assentiment du général
de Gaulle. Guy Môquet fut un moment idéal dans le dispositif légendaire communiste :
ce jeune homme stalinien qui défendait l'union des communistes avec les nazis contre
la démocratie parlementaire, autrement dit le contraire de la Résistance, devint la
figure emblématique d'une résistance communiste totalement inexistante à cette
époque.
Il y eut d'autres moments dans cette légende : le PCF fabriqua un faux pour faire
croire qu'il avait appelé à la Résistance dès le 10 juillet 1940, « l'appel du 10 juillet » ;
il s'intitula « le parti des 75.000 fusillés », alors qu'il y eut au total 4100 fusillés et
que tous n'étaient pas communistes ; il présenta fautivement quelques noms de
communistes comme résistants de la première heure (Tillion, Guingouin, Havez) alors
qu'ils furent de bons soldats du pacte hitléro-stalinien ; etc. « Qu'avez-vous encore
contre les communistes ? » me feront savoir nombre de mails ou de courriers que
je sais déjà insultants. « Rien ». Rien contre les communistes, mais tout pour
l'Histoire. Qu'il s'agisse de Freud et des freudiens, de Sartre et des sartriens, des
communistes et de leur saga, le combat contre la légende et les mythes s'effectue
moins « contre » que « pour » - en l'occurrence : pour l'histoire. Car le déni de
l'histoire constitue et nourrit le nihilisme.
Michel Onfray
2011